[MUSIQUE] [MUSIQUE] Alors, c'est clairement un sujet qui nous touche tous dans notre quotidien, que nous avons largement le sentiment de subir et qui génère donc, à raison, de l'inquiétude. Nous sommes, en effet, tous témoins, soit directement, soit via les médias, des atteintes à notre environnement ; nous en sommes, d'ailleurs, souvent acteurs également, et nous voyons bien que la dégradation de cet environnement a, ou aura, à terme, un impact sur notre propre santé. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, 20 % des pathologies seraient aujourd'hui d'origine environnementale dans le monde. La prise de conscience des effets du développement économique sur l'environnement et sur la santé en Europe est finalement assez récente, puisqu'elle a débuté, avec la question de la pollution de l'air, dans les années 1960, et que la première conférence internationale sur le sujet santé-environnement de l'Organisation Mondiale de la Santé a été réunie, je dirais seulement, en 1974 à Helsinki. Cette prise de conscience s'est accélérée avec l'amélioration des connaissances, et la publication croissante d'études épidémiologiques mettant en relation l'exposition à certaines substances et certaines pathologies. On a, par exemple, des liens entre l'exposition au plomb et le saturnisme, l'exposition à l'amiante et les mésothéliomes, ou encore l'exposition à des produits chimiques comme le benzène et le cancer de la vessie. On appréhende, d'une façon générale, de mieux en mieux le danger et ces données sont de plus en plus accessibles au grand public. On a en plus le sentiment assez largement partagé d'une accélération de cette dégradation de l'environnement, avec les effets du changement climatique, avec l'épuisement des ressources de la planète, l'impact grandissant des nouvelles technologies, ou encore une exposition croissante aux substances chimiques avec l'explosion de la chimie moderne de synthèse depuis les années 1940. Mais, dans le même temps, il est juste de dire et de souligner qu'un certain nombre de progrès significatifs ont été réalisés sur plusieurs sujets d'importance depuis ces dernières décennies. Par exemple, la baisse de la pollution de l'air au dioxyde de soufre, ce qu'on appelait les pluies acides, on n'en parle plus aujourd'hui, il y a eu de très fortes réductions ; le retrait de très nombreux produits pesticides qui étaient particulièrement dangereux ; ou encore des règles plus strictes en matière d'urbanisation : l'interdiction du plomb dans l'essence qui a conduit, là aussi, à une forte baisse du saturnisme. Dans ce contexte général, il y a une très forte attente pour que les pouvoirs publics agissent, afin de prévenir les risques émergents et de mieux protéger les populations. [MUSIQUE] L'Organisation Mondiale de la Santé considère que les facteurs environnementaux sont une des principales causes de la forte progression de maladies dites chroniques, comme les allergies, le diabète, certains cancers hormono-dépendants, ou encore des problèmes de fertilité. Ces facteurs sont multiples : la pollution de l'air, avec notamment les particules fines, la multitude de substances chimiques, auxquelles nous sommes exposés dans notre quotidien, les ondes, qui ont littéralement envahi notre espace avec le développement spectaculaire des nouvelles technologies de l'information et de la communication ; mais aussi les nouveaux virus et bactéries à l'origine de maladies infectieuses dont le développement est favorisé par la mondialisation des échanges et qui deviennent résistants aux antibiotiques. Sur le plan scientifique, il existe 2 grandes catégories d'effets sur la santé : les effets dits avérés, comme le tabagisme passif, ou le cancer du poumon ; les effets suspectés, comme l'exposition à certaines substances chimiques, même à faible dose, qui pourraient être à l'origine de problèmes de fertilité, par exemple. Ces facteurs environnementaux sont potentiellement assez nombreux, avec beaucoup d'incertitudes scientifiques sur le lien précis entre chacun d'eux et les pathologies constatées. Car, au cours de notre vie, nous sommes exposés, de façon diffuse, sur de longues durées, à une multitude de dangers liés à notre environnement, au sens large du terme, que cela soit en milieu professionnel, que cela soit via notre alimentation ou via l'environnement, à savoir l'air, l'eau, les transports, le sol qui nous environnent. Il faut aborder ces facteurs environnementaux de façon globale et transversale. En tant qu'individus, notre santé est pour partie liée à notre patrimoine génétique, notre génome, mais aussi pour partie, et c'est un concept assez nouveau, par notre exposition aux risques via notre environnement qu'on appelle l'exposome. Il s'agit de notre exposition, dans notre vie quotidienne et tout au long de la vie, aux substances chimiques, aux agents microbiologiques, ou encore aux agents physiques, comme les particules ou les ondes électromagnétiques. L'enjeu, aujourd'hui, n'est plus seulement d'évaluer de façon isolée les risques liés à tel ou tel agent, telle ou telle source de danger spécifique, mais de travailler sur l'impact pour notre santé, des interactions entre ces différents facteurs. Autre point important à souligner : il y a des populations et des périodes de la vie où nous sommes plus vulnérables à ces expositions environnementales. C'est notamment le cas pour les femmes enceintes et le fœtus, pour les jeunes enfants et les personnes âgées. [MUSIQUE] Face à un sujet complexe car ayant de multiples origines et marqué par de nombreuses incertitudes scientifiques, les modalités d'action doivent être multiples et, je dirais, multiformes. Il existe, pour simplifier, 3 grands types de leviers en matière de politique publique. D'abord, la connaissance : maintenir un effort important en termes de recherches, d'études, et d'observations ; c'est nécessaire parce qu'il y a encore beaucoup d'incertitudes scientifiques sur le sujet. Deuxième chose, la surveillance : surveillance environnementale et de santé ; il faut être attentifs aux signaux émergents. Puis, le troisième point, c'est bien sûr la réduction, à la source, des contaminants. Pour agir, il faut donc rechercher à supprimer, ou à défaut à réduire à la source, les contaminants de l'environnement les plus préoccupants pour la santé publique, à savoir les particules fines, toutes les substances chimiques qui sont les plus préoccupantes ; on parle beaucoup de ce qu'on appelle des perturbateurs endocriniens, ou des substances cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques. Il faut développer les procédés industriels, agricoles, urbains les plus respectueux pour l'environnement : l'agroécologie, notamment, en favorisant des approches dites de biocontrôle pour réduire le recours aux produits chimiques de synthèse, ou encore dans le domaine des transports, des bâtiments, prenant mieux en compte les enjeux énergétiques et écologiques. C'est avant tout de la responsabilité des pouvoirs publics et des acteurs économiques, mais cela n'est pas facile car cela bouscule des intérêts économiques. Mais c'est aussi, et je finirai par cela, de la responsabilité de chacun d'entre nous, car c'est avant tout par un comportement responsable, en tant que consommateurs, en tant que travailleurs, en tant que citoyens, que nous parviendrons, individuellement et collectivement, à relever ce défi de la santé environnementale. [AUDIO_VIDE]