[MUSIQUE] [MUSIQUE] Une grande partie de l'empreinte carbone d'une entreprise est due à son activité industrielle. C'est par exemple la production, l'achat des matériaux, le transport ou le gaspillage. Et en plus, il ne suffit pas de regarder uniquement l'impact de sa propre entreprise, il faut aussi considérer celui de toute la chaîne de valeur, en amont et en aval, jusqu'à considérer l'ensemble des activités tout au long de la vie d'un produit. Pour l'empreinte carbone, on peut considérer sa propre production, souvent appelée les émissions de Scope 1 ; mais également l'énergie achetée à l'extérieur, ce qu'on appelle souvent le Scope 2 ; et puis, toute l'empreinte carbone des fournisseurs et de celle de leurs fournisseurs et de leurs fournisseurs, ce qu'on appelle le Scope 3. C'est naturel de considérer le Scope 3, car la décision d'une entreprise impacte l'ensemble de la chaîne de valeur. Par conséquent, ce sont souvent les directions des opérations, c'est-à-dire les équipes de la supply chain, des achats ou la planification de la production et encore d'autres, qui ont la possibilité de mesurer et de réduire l'empreinte carbone et l'impact écologique d'une entreprise. Ces équipes devraient être les premiers alliés des responsables RSE. Pour prendre un exemple, le groupe LVMH a annoncé en 2016 dans le cadre de sa stratégie LIFE qui veut dire LVMH Initiatives For the Environment, l'objectif stratégique de réduire son empreinte carbone de 25 % en 2020. Mais une fois l'objectif fixé, comment y parvenir? Quels sont les leviers dont l'entreprise dispose? Ici aussi, la supply chain et les achats sont les premiers outils pour y arriver. La supply chain, ça concerne d'abord la conception du réseau d'approvisionnement et de distribution, comme le choix de la localisation du site, c'est-à-dire des entrepôts, des usines ou des ateliers de production. Plus les sites sont localisés à proximité du client ou encore à proximité des matières premières, plus la distance à parcourir est réduite. Les entreprises qui émettent peu d'émissions sont souvent celles qui produisent à proximité de leurs clients. Autre point à considérer, la question du nombre de sites. Plusieurs petits sites peuvent réduire la distance sur laquelle les produits vont être transportés en évitant des détours, mais avoir des grands centres peut permettre de consolider les flux et de réduire les émissions. Le Massachussetts Institute of Technology a montré avec l'exemple d'une entreprise de grande distribution au Mexique qu'une consolidation des transports pouvait réduire les émissions de carbone de plus de 30 %. La supply chain c'est aussi le transport et le stockage des produits. Le choix du mode de transport est particulièrement important. L'avion et le camion génèrent plus d'émissions que le bateau ou le train. Par exemple, pour un transport de l'Asie vers l'Europe, le bateau crée 13 à 40 grammes de CO2 par tonne-kilomètre. L'avion, en comparaison, 350 à 2 000 grammes de CO2 par tonne-kilomètre. C'est environ 30 fois plus. Dans le même sens, éviter les flux inutiles du transport vide sont souvent les leviers pour réduire les émissions. Dans le transport en cargo, plus d'un tiers des conteneurs sont transportés vides. Une optimisation globale des flux logistiques qui prend en compte l'ensemble des facteurs clés est nécessaire pour trouver le réseau qui permet de réduire au mieux l'empreinte carbone. La supply chain, c'est aussi la prévision de la demande et la planification des capacités de production. Deux facteurs qui contribuent fortement à l'impact écologique des supply chain sont par conséquent le gaspillage et la surproduction. Pour déterminer la quantité de production, l'équipe supply chain établit d'abord une prévision de ventes, avant de faire un planning détaillé sur la base de cette prévision. Dans beaucoup de secteurs, les prévisions de ventes sont difficiles à établir, avec des erreurs de prévisions de 30 ou de 40 %. Il y a par conséquent un risque de produire une surquantité qui n'est pas vendable. Bien gérer l'incertitude est améliorer en continu la façon de prévoir la demande du client sont par conséquent indispensables pour éviter de la surproduction et du gaspillage. Dans ce sens, les outils de big data ont contribué ces dernières années à avoir une meilleure compréhension du comportement du consommateur. L'entreprise Blue Yonder par exemple a développé des outils de prévision basés sur le machine learning, qui intègrent plus de 200 variables pour prédire des futures ventes, réduisant le gaspillage de la supply chain par plus de 10 %. Et quand tous les leviers d'amélioration du planning sont exploités, que faire avec les produits invendus? Beaucoup d'entreprises donnent leurs invendus à des fins humanitaires ou les transforment, ou encore réutilisent les matériaux. Par exemple, le startup Phenix propose pour l'industrie de la distribution une solution pour les produits invendus, par exemple par dons à des associations humanitaires. Il a pu ainsi sauver 40 millions de repas en 2019, soit une économie de 100 000 tonnes de CO2. Pour l'équipe des achats, le focus est la gestion des émissions de Scope 3, c'est-à-dire les émissions émises par l'ensemble de la chaîne, y compris les fournisseurs. Les achats accompagnent les fournisseurs dans la définition d'une politique responsable et dans leur transition écologique. Par exemple, le Cabinet de conseils EcoVadis accompagne ses clients dans le développement de score cards environnementaux pour fixer des objectifs et pour suivre la performance de leurs fournisseurs. Mais les achats définissent aussi des objectifs de réduction de l'empreinte carbone pour les fournisseurs et mettent des exigences qui sont à la hauteur de l'ambition stratégique de l'entreprise. Par exemple, les achats exigent des accréditations ou des labels auprès de l'ensemble de leurs fournisseurs comme la norme ISO 14001, qui définit des systèmes de management environnemental ; ou la norme ISO 26000, qui donne les lignes directrices pour une responsabilité sociétale ; ou encore le label Carbon Disclosure Project, qui publie des reporting sur la performance écologique des entreprises. Et les achats mettent aussi en place des audits RSE auprès de leurs fournisseurs. Ils encouragent le partage de bonnes pratiques entre fournisseurs et forment les collaborateurs des fournisseurs aux compétences techniques durables. Prenons un exemple. Le fabricant de technologie Philips a développé son propre audit RSE : le Philips Supplier Sustainability Performance Program, auquel participent chaque année plus de 200 fournisseurs. Cet audit précise des standards pour les différents indicateurs de gestion environnementale et d'éthique, et attribuent un score de 0 à 100 à un fournisseur pour indiquer son niveau de performance par rapport à ces standards, ce qui permet au fournisseur d'identifier les points d'amélioration. En résumé, la direction des opérations avec ses différentes équipes est une vraie source d'inspiration qui possède un riche portefeuille de leviers pour mettre en œuvre la stratégie RSE de l'entreprise. De nombreuses opportunités existent. Maintenant, il faut déclarer la réduction de l'empreinte écologique d'une importance stratégique, et commencer. [MUSIQUE] [MUSIQUE]