[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans ce deuxième module de ce troisième MOOC, Innover au cœur de l'impact investing, nous allons nous intéresser à deux outils très innovants, qui viennent compléter ceux présentés dans le module précédent. Il s'agit des Social Impact Bonds et du Collective Impact. C'est, en quelque sorte, l'investissement collectif au service de l'impact social comme voie de renouvellement de l'action de l'État et des pouvoirs publics. Je vous présenterai d'abord la situation en Grande-Bretagne et aux États-Unis, tant pour le Collective Impact que pour les Social Bonds, pour ensuite voir quelles sont les perspectives en France, pour le développement de ces deux outils. Commençons par analyser l'émergence du Collective Impact et des Social Impact Bonds dans le monde anglo-saxon. Et ce n'est pas un hasard si cette émergence intervient dans le contexte anglais ou américain, dont chacun sait qu'il est caractérisé par un rôle de l'État qui est très circonscrit. Le collective impact et les Social Impact Bonds, ou titres à impact social en français, ont en commun d'être des nouveaux leviers d'action et de financement, pour répondre aux défis auxquels font face les sociétés occidentales. En effet, depuis plusieurs années, nos sociétés occidentales font face à une crise qui induit à un accroissement des besoins, en quantité comme en complexité, ce qui exige des actions toujours plus nombreuses et toujours plus coûteuses, avec cette crise qui, dans le même temps. restreint la capacité des pouvoirs publics, du fait d'un cadre budgetaire particulièrement contraignant, et de restrictions budgétaires importantes. Le Collective Impact et les Social Impact Bonds visent à répondre simultanément à un besoin d'action à fort impact social, mais également à une optimisation de l'utilisation des ressources budgétaires et humaines, pour développer ces actions à fort impact social. Comme je viens de vous le dire, puisque le Collective Impact et le Social Impact Bonds se développent principalement en Grande-Bretagne et aux États-Unis, depuis quelques années, il convient d'insister sur le caractère spécifique des systèmes politiques et sociétaux anglo-saxons. Il s'agit d'États centrés sur leur fonction régalienne, l'État-providence y étant sinon inexistant, du moins peu développé, beaucoup moins développé qu'en France. Par conséquent, la société civile est souvent très investie dans les actions à visée sociale, à travers non seulement les associations, mais également la philanthropie, qui s'est particulièrement développée aux États-Unis, comme au Royaume-Uni. Le système de l'économie sociale et solidaire est donc moins soutenu par les pouvoirs publics qu'il ne l'est en France. Les Social Impact Bonds et le Collective Impact sont donc principalement à la recherche de plus d'efficacité par le développement d'innovations sociales, afin non seulement d'optimiser l'action des pouvoirs publics, mais également d'alléger la charge budgétaire à laquelle ils sont soumis. La recherche d'efficacité se traduit par une recherche poussée de l'impact social, avec pour le Collective Impact, comme pour les SIB, une place essentielle accordée à l'évaluation de cet impact. L'importance donnée aux objectifs chiffrés en amont de l'action et à l'évaluation neutre et postérieure à l'action est, là aussi, spécifique du monde anglo-saxon. La France, si elle s'inspire naturellement de ces innovations, devra également les transposer à sa réalité sociétale et politique, mais nous y reviendrons. Voyons maintenant quels sont les principes du Collective Impact, puis ensuite, les premiers enseignements du programme Strive, qui constitue une des premières actions de Collective Impact. Donc, les principes. Le Collective Impact consiste en l'union d'acteurs d'horizons divers, sur un territoire donné, pour résoudre ensemble un besoin observé et non satisfait, sur le territoire. Un Collective Impact repose sur la mise en place d'un objectif d'impact précis, clair et chiffré, en rapport direct avec la problématique traitée. Baisser le décrochage scolaire, baisser le taux de grossesse non désirée chez des adolescentes, baisser la criminalité, baisser le taux de récidive des détenus libérés de prison. Les acteurs investis du territoire vont coordonner leurs forces, afin d'atteindre cet objectif. Le Collective Impact est souvent une union d'acteurs de plusieurs secteurs, pour faire face à la complexité du besoin, qui exige une réponse multidisciplinaire. Associations, entreprises, mouvements citoyens, collectivités territoriales, institutions publiques. Ces acteurs sont souvent complémentaires dans leur capacité à formuler une réponse au problème qui doit être traité. Une organisation Colonne vertébrale, coordinatrice, joue cependant un rôle de pilote et de coordinateur de l'action. Un Collective Impact se construit en plusieurs phases. Tout d'abord, dans une première phase, les acteurs décident d'unir leurs forces pour résoudre un problème, et décident de mettre en place une réponse commune. C'est un premier temps essentiel et souvent long, où les acteurs doivent non seulement apprendre à se connaître, créer des relations de confiance, mais où ils doivent également suffisamment circonscrire la problématique traitée, afin de fixer ensemble les objectifs chiffrés de leur action. Puis, vient le deuxième temps, celui de l'action. Les acteurs font souvent progressivement évoluer leurs pratiques respectives, pour prendre en compte ce que font les autres. Ils vont référencer mutuellement leurs publics et ajuster les programmes d'action, pour être les plus complémentaires possibles les uns avec les autres. Dans certains cas, ils vont aller jusqu'à mettre en place de nouvelles actions communes. Tout au long de la phase d'action, se déroule également la phase d'évaluation, en toile de fond perpétuelle de l'action développée. Enfin, une dernière phase pose la question de la pérennisation du Collective Impact. Si cette dernière est facilitée par une bonne évaluation, mettant en exergue les résultats obtenus par l'action, elle demeure particulièrement soumise à la mobilisation de financements dans la durée. Les initiatives de Collective Impact partent souvent avec peu de ressources, beaucoup de bonne volonté, mais nécessitent de nouveaux partenaires et d'autres financements, dès lors que l'on cherche à mettre en place de nouvelles actions ou que l'on cherche à aller plus loin dans la résolution du problème. Après des principes de fonctionnement, quels sont les premiers résultats? Et nous allons nous arrêter un instant sur l'exemple historique du Collective Impact que constitue le Strive, développé aux États-Unis, à Philadelphie. En effet, la première expérience de Collective Impact visait à diminuer le décrochage scolaire des jeunes dans la ville de Philadelphie, aux États-Unis. Intitulé Strive et lancé en 2006, ce projet a réuni un grand nombre d'acteurs autour de la table. Les collectivités en charge du financement des politiques de l'éducation, les entreprises, les associations de parents, et plus généralement, tous les acteurs de l'écosystème de la lutte contre le décrochage scolaire et en faveur de la réussite scolaire. Ensemble, ils se sont fixés un objectif commun et ils ont décidé de coordonner leurs actions, de mieux les articuler et de mettre en place des actions communes tout en développant une évaluation partagée. Au bout de cinq ans, Strive a constaté une amélioration de 40 indicateurs d'impact, sur un total de 53. D'une façon générale, le projet Strive a considérablement crédibilisé l'approche du Collective Impact. Et trois chiffres peuvent illustrer cette crédibilisation, plus 9 %, on a constaté une hausse de 9 % des dispositions à apprendre des enfants, à l'école maternelle. Et les études ont montré l'importance de ce point crucial pour la réussite académique future d'un enfant. Plus 11 %, c'est l'augmentation du taux de succès des lycéens en fin de cursus. Plus 10 %, c'est l'accroissement du nombre d'inscrits à l'université. Le projet Strive a été répliqué dans d'autres villes des États-Unis. Le Collective Impact s'est, par la suite, répandu au Canada et est actuellement en mouvement, en émergence, dans plusieurs pays d'Europe, ainsi que nous le verrons un peu plus tard.