[MUSIQUE] [MUSIQUE] Revenons à présent aux origines du contrat à impact et à son état de développement dans le monde d'aujourd'hui. Commençons par son émergence au Royaume-Uni. La genèse du contrat à impact remonte à 2007 quand le premier ministre britannique de l'époque, Tony Blair, demande à un organe de conseil indépendant de, je cite, susciter des initiatives qui permettraient au gouvernement et aux acteurs clés concernés de développer l'action sociale. Ce besoin sera renforcé dans le contexte de la crise économique qui débute en 2008 avec des contraintes budgétaires devenues fortes pour les pouvoirs publics. L'objectif est alors de pouvoir soutenir l'émergence d'innovation dans le champ social tout en limitant le risque pour les pouvoirs publics. C'est ainsi qu'on imagine le dispositif de ce que les Anglo-saxons appellent le social impact bond qui permet en effet d'introduire des capitaux privés qui portent le risque de l'innovation, l'État ne prenant le relais qu'une fois l'efficacité de l'innovation sociale prouvée et établie. Le premier contrat à impact au monde est ainsi lancé en 2010 à la prison de Peterborough en Angleterre à l'initiative du ministère de la justice britannique. Il s'agissait d'expérimenter différents types d'accompagnements personnalisés auprès de personnes condamnées à de courtes peines de prison pour diminuer le taux de récidive. L'expérimentation a été menée auprès de trois cohortes de 1 000 détenus pendant cinq ans. L'objectif affiché était de réduire d'au moins 7,5 % le taux de récidive des détenus accompagnés par rapport à ce qui intervient lorsqu'il n'y a pas d'accompagnement. Ce premier contrat à impact à mobilisé sept opérateurs sociaux, 17 investisseurs privés pour 5 millions de livres sterling et il a été couronné de succès. À l'issue des cinq ans d'expérimentation, le taux de récidive mesuré dans les 12 mois suivant la libération des détenus était de 9 % inférieur au taux habituel. Depuis cette première expérimentation fructueuse, de nombreux autres contrats à impact ont été structurés au Royaume-Uni, portés par une forte volonté politique. À la suite du Royaume-Uni, les États-Unis ont également cherché à expérimenter le contrat à impact. Notons d'emblée la caractéristique commune de ces deux pays. L'État-providence anglo-saxon est largement réduit par rapport à l'État-providence français, ce qui légitime d'autant l'application à l'action sociale de logique de résultats en principe réservée à la sphère privée. Quid maintenant de la situation en Europe continentale? En Europe continentale, l'Allemagne, les Pays-Bas ou encore la Belgique ont expérimenté le contrat à impact à la suite du Royaume-Uni. Parmi ceux-là , la Belgique fait figure de leader depuis le premier contrat développé en 2014 dans le champ de l'insertion professionnelle sous le nom de DUO for a JOB, un programme de coaching intergénérationnel qui associe des chercheurs d'emploi issus de l'immigration à des retraités. En France, la réflexion sur le contrat à impact a été lancée en 2013. Elle a débouché sur un appel à projet en 2016, au terme duquel six contrats ont éte mis en place avec l'Adie, dont a parlé tout à l'heure, avec les Apprentis d'Auteuil, que vous avez rencontrés également dans ce module, respectivement sur l'aide à la création d'activités économiques en zone rurale pour l'Adie et sur la protection de l'enfance pour les orphelins Apprentis d'Auteuil. Mais également, il y a eu des contrats avec Article 1, dans le champ de la réussite scolaire, avec IMPACT Partenaires pour l'emploi dans les quartiers prioritaires de la ville, avec la Cravate solidaire et Wimoov dans le champ de l'insertion professionnelle et la lutte contre le chômage. Alors que ces contrats arrivent à échéance en 2021, 2022, le gouvernement a intensifié sa réflexion sur le dispositif dès 2019 en mettant notamment en place un groupe de travail présidé par Frédéric Lavenir, le président de l'Adie dont je vous ai parlé tout à l'heure et qui a débouché sur le rapport que je vous ai mentionné, qui porte son nom. Je vous invite à le parcourir d'ailleurs si ce sujet vous intéresse plus particulièrement. Fin 2020, cette fois-ci, ce sont trois appels à projets qui sont lancés, dotés initialement de 10 millions d'euros chacun. Ces appels à projets portent sur l'économie circulaire et là , il est intéressant de noter que la logique du contrat à impact a été élargie du champ social au champ environnemental. C'est un appel à projets qui a été piloté par l'ADEME, qui a sélectionné huit projets pour un montant final de près de 30 millions d'euros, alors que 10 millions d'euros étaient prévus initialement. Deuxième série de projets, l'égalité des chances économiques. Quatre projets ont été sélectionnés par le ministère du travail pour 12 millions d'euros versus 10 millions d'euros prévus initialement. Le troisième appel à projets concerne le domaine de l'accès à l'emploi. Il est également porté par le ministère du travail et ses lauréats n'ont pas encore été dévoilés en octobre 2021. Enfin, globalement dans le monde, en avril 2021, le bilan réalisé par l'Impact Investing Lab, disponible en ressource complémentaire, indique qu'après 11 ans d'expérimentation, 213 contrats à impact ont été structurés dans 34 pays pour un montant de 550 millions d'euros. Depuis 2010, les montants investis ont augmenté graduellement avec plus de 80 millions d'euros par an investis en 2016, 2017, 2019 et 2020. Les secteurs les plus représentés en montant sont la famille avec près de 120 millions d'euros, suivi de l'emploi et de la santé. Un seul contrat à impact a été structuré sur la thématique environnementale, totalisant cependant à lui seul plus de 20 millions d'euros quand la moyenne par contrat se situe entre 2 et 3 millions d'euros. L'Amérique du Nord et le Royaume-Uni arrivent en tête des zones où le contrat à impact a été le plus mis en place, sans surprise. L'Europe continentale complète le podium, mais avec un montant total investi significativement inférieur. [AUDIO_VIDE]